Etats-Unis : la Fed promet un taux zéro jusqu'en 2013 et envisage d'en faire plus
La banque centrale américaine le 9 août 2011 à Washington
© AFP Karen Bleier
La banque centrale des Etats-Unis (Fed) a promis mardi de garder son taux d'intérêt directeur près de zéro au moins deux ans encore, et annoncé qu'elle envisageait d'en faire plus pour contrer la dégradation de la conjoncture économique dans le pays.
Ce taux directeur, maintenu entre 0% et 0,25% depuis décembre 2008, devrait rester à ce niveau "au moins jusque mi-2013", a indiqué l'institution dans un communiqué à l'issue d'une réunion de son comité de politique monétaire.
C'est la première fois que la Fed prend un engagement aussi précis. Jusque-là, elle prévoyait de le maintenir à ce niveau "pendant une longue période", formule ambiguë et diversement interprétée.
Cette perspective de voir la politique monétaire bloquée sur le mode "taux zéro" à moyen terme montre l'état inquiétant de la première économie mondiale. "Il n'y a là rien pour rétablir la confiance dans le dollar", estimaient les analystes de RDQ Economics.
Mais la Bourse de New York, dans un premier temps hésitante, a fini la séance en trombe, avec une hausse de 3,98% pour le Dow Jones et 5,29% pour le Nasdaq.
"La croissance économique cette année a été considérablement plus lente que ne l'avait prévu le comité", a relevé la Fed, et "les risques pour les perspectives économiques se sont accrus".
L'institution a vu en 2011 ses prévisions constamment démenties par les faits. Alors qu'en janvier ses dirigeants voyaient la croissance atteindre 3,4% à 3,9% en fin d'année, cet objectif est aujourd'hui complètement illusoire: au premier semestre, le taux de croissance est descendu sous les 1% en rythme annuel.
Des économistes sont allés jusqu'à se demander si les Etats-Unis n'étaient pas de nouveau en récession, comme l'ancien secrétaire au Trésor Larry Summers, qui situe cette probabilité à "une chance sur trois".
La banque centrale a rapporté qu'elle envisageait de nouvelles mesures pour stimuler l'activité. "Le comité a discuté de l'ensemble des outils politiques à sa disposition pour promouvoir une reprise économique plus forte dans un contexte de stabilité des prix", a-t-elle expliqué.
Le détail des mesures considérées, qui n'a pas été fourni, pourrait apparaître dans le compte-rendu de cette réunion que la Fed doit publier le 30 août. Avant cela, son président Ben Bernanke pourrait les expliciter dans un discours sur la politique monétaire prévu le 26 août à Jackson Hole (Wyoming, Ouest).
Mais la Fed affiche d'ores et déjà ses divisions sur le sujet. Sur les dix votants, trois se sont opposés au changement de formulation sur le taux d'intérêt directeur, un nombre de dissidents inédit dans l'histoire des communiqués de la Fed, qui remonte à 1994.
Ont voté "non" trois présidents de branches régionales de la Fed qui professent leur réticence pour toute mesure pouvant alimenter l'inflation: Richard Fisher de Dallas, Narayana Kocherlakota de Minneapolis et Charles Plosser de Philadelphie.
Avant un nouveau cycle de relance monétaire, "la barre est de fait très haute, compte tenu de la forte résistance sur le Capitole [de la part de parlementaires républicains, ndlr] et au sein des branches régionales de la Fed", soulignait Ian Shepherdson, de High Frequency Economics.
Pour le moment, la politique monétaire de la Fed reste inchangée, après plusieurs jours de chute des indices boursiers mondiaux qui a tourné les yeux des investisseurs vers elle.
Le taux d'intérêt directeur est un outil auquel la Fed n'a pas eu l'occasion de toucher depuis deux ans et demi. Et le niveau de liquidités injectées dans le système financier va toujours être maintenu constant: la Fed continuera à réinvestir sur les marchés quand les titres qu'elle détient parviennent à maturité.
Le prochain comité de politique monétaire est programmé le 20 septembre. Mais la Fed peut toujours en convoquer un à tout moment si elle le juge nécessaire.