Le gendarme de la Bourse américaine débusque un nouveau Madoff
Un Madoff en chasse un autre. Epié depuis plusieurs semaines, le banquier et
milliardaire américain R. Allen Stanford est tombé hier sous la férule de la
Securities and Exchange Commission (SEC). Le gendarme de la Bourse américaine
l'accuse d'être au coeur d'une fraude de 8 milliards de dollars, qui durait
depuis une quinzaine d'années. La plainte du régulateur boursier cible la vente
par le financier de certificats de dépôts à la rentabilité falsifiée.
Habituellement proposés par les banques commerciales, ces produits financiers
sont réputés sûrs et donc relativement peu rémunérés. Or, les certificats de
dépôts proposés par la Stanford International Bank (SIB) affichaient un
rendement généreux pouvant atteindre 10 %. Sis à Antigua-et-Bermuda, une petite
île des Antilles connue pour sa clémence en matière financière, l'établissement
fait partie du Stanford Financial Group. La firme, basée à Houston, la plus
grande ville du Texas, prétend avoir 50 milliards de dollars d'actifs sous
gestion ou bénéficiant des conseils de ses professionnels du Stanford Group
Company (SGC), une des entités du groupe financier.
Des données fabriquées
La SEC enquête aussi sur « une affaire supplémentaire », liée à la
vente pour 1,2 milliard de dollars de parts d'un fonds commun de placement
baptisé SAS (Standford Allocation Strategy), en falsifiant ses performances
passées.
« Stanford et son cercle rapproché ont perpétré une fraude massive fondée
sur des fausses promesses et des données fabriquées pour attirer les
investisseurs », selon la directrice des enquêtes de la SEC Linda Chatman
Thomsen, qui doit très prochainement quitter son poste. Rose Romero, directrice
régionale de la SEC, va même jusqu'à dire que la tromperie d'Allen Stanford a su
« déployer ses tentacules partout dans le monde. »
D'après la plainte formulée par le régulateur boursier, Allen Stanford et ses
acolytes James Davis et Laura Pendergest-Holt ont sciemment « dénaturé »
les faits auprès des acquéreurs de leurs certificats de dépôt. Ils leur auraient
assuré que l'argent collecté était réinvesti dans des instruments financiers
liquides et « sûrs ». Le portefeuille ainsi constitué était soi-disant
suivi de près par une équipe de plus de 20 analystes et, comble de la vertu,
audité annuellement par les régulateurs antiguais. Selon la SEC, les sommes
étaient largement investies dans des fonds de « private equity » et de
l'immobilier et gérées par deux personnes seulement.
Les accusés auraient menti à leurs investisseurs en maintenant que la SIB
n'était aucunement exposée à la fraude de Bernard Madoff. La figure de
l'ex-président du Nasdaq, aujourd'hui accusé d'une fraude de près de 30
milliards de dollars, selon les dernières estimations, hante la finance
américaine depuis son arrestation le 11 décembre.
Similitudes troublantes
Si elle se révèle exacte, la fraude d'Allen Stanford présenterait d'ailleurs
des similitudes troublantes avec celle de Madoff. A commencer par la place de sa
famille dans la gestion de ses affaires. D'après la SEC, les membres de son clan
se trouvent à plusieurs échelons de Stanford Financial Group. Pour couronner le
tout, la plainte de l'autorité américaine relève également une fraude de quelque
1,2 milliard de dollars liée à la vente par les professionnels de la structure
de conseil financier d'Allen Stanford de produits relatifs à des fonds mutuels
aux données falsifiées.
MATHIEU ROSEMAIN
http://www.lesechos.fr/info/marches/4832646.htm